Imprimerie à Toulouse
Le temps 
du déclin
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Sommaire
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Le temps du déclin
¶ L'imprimerie à Toulouse sous Louis XIII et Louis XIV
Au XVIIe siècle, Toulouse est encore un centre typographique d'une certaine importance, comme le prouve le fait que dans la hiérarchie des grandes villes d'apprentissage, Toulouse arrive encore en troisième position après Paris et Lyon, mais avant Bordeaux et Rouen. 

En 1624, le poste de directeur de la Librairie est créé avec pour fonction de contrôler les imprimeurs. En janvier 1626, un décret interdit sous peine de mort les impressions sans permission. Seules Paris et Lyon peuvent imprimer toute sorte d'ouvrages; Toulouse doit, elle, se limiter aux livres d'heures, aux catéchismes, aux almanachs, aux thèses et aux manuels scolaires.

A la même époque est créée à Toulouse, la Communauté des Libraires et Imprimeurs sur le modèle parisien (1620). Lorsqu'il est reçu, le maître imprimeur doit faire un don à la caisse de la Communauté pour faire dire un office, puis aller saluer le Chancelier de l'Université dont il devient un des suppôts. Cette situation particulière à l'égard de l'Université, l'affranchit des nombreuses contraintes qui pèsent sur les artisans et les marchands ordinaires. Il dépend directement du Lieutenant général de la Toulouse, qui a en charge la police de l'Université, et non des Consuls et des Capitouls.

Des grands noms de l'imprimerie du XVIe siècle, seul celui des Colomiès survit. Cette famille, avec celle des Boude et des Bosc qui apparaissent à cette époque, va dominer le marché toulousain du livre. Le XVIe siècle voit également les premiers pas de la grande dynastie des Douldaoure avec Jean puis Jean-Jacques et Jean-Paul.

A partir de 1671, Toulouse obtient le droit de publier la Gazette, le premier journal d'information français, créé par Théophraste Renaudot en 1631. Tous les vendredi, jour de publication de la Gazette, un courrier postal partait de Paris, transportait un exemplaire à cheval à Toulouse, où elle était réimprimée avec son petit supplément local le vendredi suivant et distribuée le samedi. 

¶ La renaissance de la littérature occitane

Au début du XVIIIe siècle, la littérature qui représente une part importante de la production toulousaine est renforcée par le développement d'une nouvelle littérature occitane illustrée par Pierre Godolin (1580-1649). Ce dernier, véritable chef de file la la renaissance occitane, s'est rapidement détourné du barreau pour se consacrer à la poésie. 

Sa principale ouvre, le Ramelet moundi (le bouquet raymondin) eut assez de succès pour être plusieurs fois réimprimés par les libraires-imprimeurs qui feront la fortune de Toulouse: Jean Boude (1638), Pierres Bosc (1647), Raymond Colomiès (1677) ou encore Jean Puech (1678). Dans l'édition originale, Godolin avertissait ainsi le lecteur: « Nouirigat de Toulouso me play de monteri soun lengatge bél », « enfant de Toulouse, il me plait de faire subsister son beau langage ».
 
Pey de Garros

Un texte en gascon,
les Poésies de Pierre de Garros, 
Toulouse, 1567

Dans son sillage, seront imprimés d'autres littérateurs occitans tel le poète Guillaume Ader (ca 1570-1638) ou encore l'écrivain burlesque Jean de Valès. Déjà, les imprimeurs toulousains doivent se cantonner à ce type d'ouvrage dans la mesure où les grands classiques français sont devenus une exclusivité des presses parisiennes. Les imprimeurs toulousains se rabattent donc sur des auteurs locaux. On peut ainsi citer le célèbre ouvrage de Guy du Faur de Pybrac, avocat au parlement de Toulouse, qui édita chez la veuve Colomiès en 1600, Les quatrains du s. de Pybrac... contenant préceptes et enseignements utiles pour la vie de l'homme

¶ La Réforme encore et toujours

Montauban va s'opposer à la très catholique Toulouse dans la controverse religieuse qui continue de secouer la France méridionale. Dans cette cité toute acquise à la Réforme, les libraires et les imprimeurs vont diffuser des textes protestants, parfois très combatifs, tels ceux du pasteur Daniel Chaumier qui prit une part active au siège de 1621, et qui sera imprimé par Haultin, le successeur de Rabier. Sont ainsi imprimés, L'Eglise réformée; assemblée générale de Nisme (1618) ou encore La Jésuitomanie ou les Actes de la dispute de Lectoure (1618).

En réaction, l'évêque de Montauban confie ses commandes à des imprimeurs catholiques locaux, tels Arnaud de Saint Bonnet (ca 1640), Jean Royer et Samuel Dubois qui se fait appeler « imprimeur de l'évêque » (ca 1644). Mais ses documents les plus importants, il fera imprimer à Toulouse, chez les Colomiès, qui lui fourniront, entre autres, le Calendrier du Diocèse de Montauban (1617) ou encore la Déclaration contre les relaps (1662). L'imprimerie disparaitra de Montauban et des cités protestantes avec l'abrogation de l'Edit de Nantes en 1685. 

¶ L'imprimerie à Toulouse sous Louis XV

En 1701, trois ateliers sur douze seulement, ont à Toulouse plus de quatre presses. Les entreprises ont encore une structure familiale, et font peu appel à la main d'ouvre extérieure. Toulouse est toutefois une des rares villes de provinces à pouvoir imprimer en grec. Paris domine toutefois de très loin le marché de l'édition en France avec ses 51 imprimeries, loin devant Lyon (30 ateliers) et Rouen (23 ateliers). Toulouse, est déjà assez distancé, avec ses 12 ateliers, et boxe dans la même catégorie que Bordeaux, Caen, Limoges, Rennes, Troyes ou Strasbourg. 

Cette anémie s'explique essentiellement par la concurrence des imprimeurs parisiens qui accaparent les privilèges, véritables monopoles d'impressions à durée déterminée (entre 2 et 10 ans), au point que certains n'hésitent pas à parler de «tyranie des bibliopoles parisiens». C'est que plus proche du pouvoir, les éditeurs de Paris sont capables de s'attirer les bonnes grâces du pouvoir en place. La procédure d'obtention d'un privilège est en effet complexe. Il faut d'abord transmettre le manuscrit au Garde des Sceaux qui va désigner un censeur pour le juger. Puis s'il est accepté, le libraire doit en remettre un exemplaire au Garde des Sceaux, trois à sa chambre syndicale, deux à la bibliothèque publique du Roi, un à la bibliothèque du Garde des Sceaux, un au garde du Cabinet du château du Louvre et un enfin au censeur.

Par ailleurs, le pouvoir royal a engagé une véritable politique de réduction du nombre d'atelier en France. Par des arrêts du Conseil d'Etat du Roi qui tomberont en 1704, 1739 et 1759, Toulouse verra ainsi son quota d'imprimerie passer de 14 à 10.

Nombre d'imprimeries autorisées en Languedoc

Toulouse
10
Mende
1
Montpellier
2
Nîmes
1
Albi
1
Narbonne
1
Bézier
1
Pézenas
1
Castres
1
Le Puy
1
Arrêt du Conseil d'Etat du Roi du 12 mai 1759
Dans les petites villes du Midi, la défense de l'unique lieu d'impression mobilise les autorités locales et les oppose. C'est ainsi l'origine d'un long conflit entre Carcassonne, Bézier, Narbonne et Pézenas entre lesquelles l'administration centrale avait en 1759 laissé le choix pour la suppression d'un atelier, affaire finalement réglée trente ans plus tard (1781) aux dépens de Pézenas. Bien avant, Castelnaudary avait vue son imprimerie supprimée en mai 1739 par un arrêt du Conseil d'Etat. Par ailleurs est autorisé en 1767, la création d'un atelier d'imprimerie à Bourg St Andéol, et d'un second à Nîmes en 1772.

Libraires & imprimeries dans le midi en août 1768

Toulouse
15 + 10
Albi
0 + 1
Montpellier
8 + 2
Castres
0 + 1
Nîmes
5 + 1
Narbonne
0 + 1
Beziers
2 + 1
Pezenas
0 + 1
Carcassonne
1 + 1
Mende
0 + 1
Bourg St Andéol
1 + 1
Aubenas
0 + 1
Narbonne
0 + 1
Castelnaudary
0 + 0
(librairies + imprimeries )
Les autorités mènent, par ailleurs, une chasse énergique aux livres prohibés. Dans une lettre au subdélégué de Toulouse (1728), il est ainsi indiqué que: « Vous ne pouvez rien faire de plus utile pour la tranquilité de l'Eglise, ni de plus agréable pour le gouvernement. » En 1745, l'imprimeur toulousain Delrieu, accusé d'avoir imprimé des livres interdits contre la Religion s'est enfui et a été condamné par contumace aux galères perpétuelles.
 
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